Dans une ambiance de mobilisation générale contre le racisme duquel découle les violences policières, Jo Le Phéno se positionne une nouvelle fois. En effet, celui-ci prend la parole une troisième fois au travers de Bavure 3.0 dans lequel il exprime sa colère face à ces violences qui demeurent encore et toujours d’actualité. Comme il le dit lui-même « J’ai refais bavure car la police tue ».
En 2016, il avait sorti le titre et clip Bavure qui dénonçait déjà les violences policières, il s’était retrouvé au cœur d’un scandale, le ministre de l’intérieur de l’époque Bernard Cazeneuve avait alors porté plainte contre lui pour « haine anti-flics ». L’année 2016 correspond également à la mort d’Adama Traoré par étouffement suite au placage ventral des gendarmes, cela fait également écho à la mort de Lamine Dieng en 2007, considéré comme un grand de la cité de Jo Le Phéno, après avoir été immobilisé etpressé au sol par la police. Jo va récidiver avec Bavure 2.0 en 2017 pour répondre à ses détracteurs et continuer à dénoncer. Tout récemment c’est la mort par étouffement de George Floyd aux Etats-Unis qui va remettre le débat des violences policières et du racisme au sein de la police au centre des préoccupations citoyennes. Jo Le Phéno reprend alors la parole avec Bavure 3.0, « En 2016 ils ont plainté, en 2020 ça va barder ». Le seul fait qu’il y ait un Bavure 3.0 montre y a un réel problème car cela signifie qu’il y a encore et toujours de nouvelles bavures sous entendues policières et que cette violence ne s’arrête pas.
Le clip est tourné dans son quartier de la Banane par Hannibal (420Workshop/ Daymolition), 13 ans jour pour jour après la mort de Lamine Dieng dans ce même arrondissement de Paris. Il se présente comme un rassemblement, une manifestation contre les violences policières, car on y voit des personnes, enfants et adultes, de toutes les couleurs, unies pour une même cause. Ils sont en train de militer que ce soit avec des gestes forts comme le poing levé, ou en portant des tee-shirts à messages ou encore avec des messages sur des pancartes. Le poing levé symbolise l’expression de la révolte, la force ou encore la solidarité, lors des manifestations organisées par le comité vérité et justice pour Adama c’était un symbole très largement utilisé. Les pancartes portent la mention de « Police tue » ou encore les noms de Lamine Dieng, Adama Traoré, Georges Floyd ou encore Amine Bentounsi. Ce dernier est également une des victimes tristement célèbre de la police car il a été tué en 2012 d’une balle dans le dos en tentant d’échapper à un contrôle de police, sa sœur Amal Bentounsi s’est alors emparé du combat et l’a gagné car le meurtrier a été condamné en appel. Amal, qui apparaît dans le clip de Jo Le Phéno est la présidente et activiste du collectif Urgence, notre police assassine, on retrouve également ce message sur les tee-shirts portés par les figurants dans le clip.
Sur la prod très drill de HuFel Beatz qui permet à Jo de crier sa colère on va également entendre une phrase de la chanteuse Camelia Jordana prononce sur un plateau de télé et qui avait fait polémique, il s’agit de la phrase « Il y a des personnes qui ne se sentent pas en sécurité face à un flic ». C’est une prise de position très courageuse de la part de la chanteuse qui dénonce une réalité réservée à une partie de la population est souvent invisiblisée et à laquelle on ôte la parole. Il est donc important qu’elle puisse être soutenue, c’est ce que fait le rappeur. A la fin du clip, Jo Le Phéno montre son téléphone sur lequel se trouve l’application créée par le collectif d’Amal qui permet de filmer si il y a un dérapage de police, la vidéo est alors envoyée sur un serveur indépendant, ce qui fait que même si le téléphone est subtilisé en vu de supprimer la vidéo ce n’est pas possible. Pour cela il faut filmer avec cette application nommée UVP, urgence violence policière ; il est également rappelé que conformément à la loi française il est autorisé de filmer un contrôle de police. La dernière image est très marquante car on y voit des extraits vidéo de violences policières ainsi que les photos de personnes tuées par la police et on voit que ce n’est pas des phénomènes isolés.
Jo Le Phéno qui s’illustre par l’authenticité de sa plume, son engagement mais également sa capacité à allier tout cela sur des intrus très actuelles, vaut le coup que l’on s’attarde sur son album sorti en Mars dernier 60 boulevard Ménilmontant. C’est également autour de ce quartier qu’aura lieu Samedi une marche organisée par la sœur de Lamine, Ramata Dieng pour réclamer l’interdiction de la technique de clé d’étranglement interdite la semaine dernière par le ministre de l’intérieur, avant de revenir sur ses déclarations, elle est finalement maintenue « provisoirement »…