En 2010, Médine dévoilait le titre « Animalement Rap » avec le collectif Sixième Sens, aux côtés de Kalash L’Afro, Scylla et Bakar, sur un sample du générique de la série « Amicalement vôtre ». Ce morceau offre une vision honnête et lucide du rap, loin du bling-bling et des faux récits de gangsters : « Le rap libre, voilà ce qui est brodé sur notre drapeau ». Près de 15 ans plus tard, Arabian Panther revient avec le premier acte de son nouveau projet, « Stentor ». Le rappeur pourrait reprendre à son compte la punchline de Booba dans « Kyll » : « J’ai une polémique par mois mais je reste jovial ».
Souvent attaqué dans les médias traditionnels, Médine, qui revendique son identité et ses convictions dans ses textes comme dans son mode de vie, incarne peut-être « le Français qu’on refuse » (« RER D » – Médine). Sa saga des « Enfants du Destin » a provoqué un tollé, sa prestation à la Fête de l’Humanité a déclenché une vive polémique, et son titre « Don’t Laïk » a fait couler plus d’encre que certains discours politiques. Cependant, cette fois, l’artiste met de côté la politique et son engagement social pour un titre, « QI.Rap », entièrement consacré au milieu du rap. Médine se montre aussi sévère avec ses propres pairs que Casey et son collectif Asocial Club l’étaient dans « 99% ». Comme en 2010, Médine se place en observateur extérieur du rap. À l’image de cette célèbre citation : « Les seules personnes qui voient la totalité du tableau sont celles qui sortent du cadre ». Et Médine, lui, ne sera jamais dans le cadre.
Médine égratigne le monde du rap avec « QI.Rap » !
Une production soignée entre influences US et touche française
L’instrumentale du morceau est signée par Kaonefy et Ashesswav. Kaonefy, beatmaker français, a déjà largement collaboré avec Médine, notamment en composant « Gaza Soccer Beach », un titre sorti bien avant les récents événements en Palestine et en Israël. Il est également crédité sur des morceaux comme « Ray », « La France au rap français » (en référence à une punchline de Passi dans « Émeute ») ou encore « Perle d’Insta ».
La production se distingue par son inspiration américaine, sans pour autant s’inscrire totalement dans le boom-bap traditionnel. On y retrouve une vibe US assumée, avec un rythme structuré pour accompagner la précision du flow de Médine.
Trois minutes de punchlines et de critiques acérées
Pendant près de trois minutes, Médine découpe l’instrumentale avec des variations de flow et une sévérité marquée envers l’industrie du rap. Le texte regorge de références et de métaphores percutantes :
« J’suis un bovin élevé au grain, pas comme ces MC’s allaités aux faux seins
Chronic 2001 dans la mémoire, à l’époque où l’meilleur rappeur était un blanc et l’meilleur golfeur était un noir »
Une référence explicite à « Chronic 2001 », considéré comme l’album le plus abouti de Dr. Dre, où le « meilleur rappeur » désigne Eminem, et « le meilleur golfeur », Tiger Woods.
L’artiste n’épargne pas les médias non plus :
« Belek aux stats, aux médias rap : La plupart d’entre eux sont des rats de stars
Ce sont nos fans qui nous mettent dans des cases, qui ne sont que des arbitres de catch »
Et il clôt son morceau avec une punchline à la fois corrosive et cynique :
« Y a que Michael Jackson qu’est passé d’pauvre et noir à riche et blanc
Y aura bien plus de gens quand on va m’pendre qu’à mon couronnement
Veuillez laisser l’rap en sortant comme il était propre en rentrant »
Un clip tourné au Canada, entre culture et paysages
Le visuel, tourné au Québec, s’appuie sur des éléments phares de la culture canadienne, notamment le hockey sur glace, avec des images d’un Canada enneigé. Ce contraste entre paysages froids et punchlines brûlantes renforce l’impact du titre.
Le clip est réalisé par Aloïs Bolou, un réalisateur basé à Montréal, connu pour accueillir les artistes francophones lors de leur passage au Canada. Il a récemment travaillé avec Georgio, Angèle et Hamza, apportant une touche cinématographique soignée à leurs clips.
Avec « QI.Rap », Médine reste fidèle à son style : incisif, analytique et toujours à contre-courant du rap formaté.