De La Soul fait partie des joyaux du rap new-yorkais. En 1988, le groupe formé par Kelvin « Posdnuos » Mercer, David « Trugoy the Dove » Jolicoeur et Vincent « Maseo » Mason voit le jour à Long Island. Alors que le Wu-Tang s’apprête à lancer l’ère du gangsta rap avec le titre « C.R.E.A.M » extrait de « Enter the Wu-Tang: 36 Chambers », et que Nas pose les premières pierres du rap conscient, De La Soul se distingue grâce au style « D.A.I.S.Y » (« Da Inner Sound, Y’all »), véhiculant un message positif et bienveillant. Au début des années 90, le groupe sort pourtant du système « D.A.I.S.Y » avec le projet intitulé « De La Soul Is Dead ».
Le projet « The Grind Date », réédité cette année après sa sortie initiale en 2004, constitue un album phare du groupe. Il a été particulièrement acclamé par la critique, notamment parce que, pour la première fois, De La Soul fait appel à de nombreux producteurs extérieurs, reconnus parmi la crème de la scène underground. Aujourd’hui encore, cet album conserve toute sa modernité et reste intemporel, contrairement à leurs premiers projets « D.A.I.S.Y », typiques de la fin des années 80. Le groupe y enchaîne également les collaborations avec des grands noms du rap américain comme Common, Sean Paul, Ghostface Killah, MF DOOM, Flavor Flav ou Carl Thomas. Deux titres, « Bigger » et « Respect », ainsi que quatre versions originales ont été ajoutés à cette réédition.
De La Soul sort donc une réédition de « The Grind Date » !
On y retrouve de grands beatmakers de la scène underground tels que Posdnuos, Supa Dave West, J Dilla, Madlib, 9th Wonder, Jake One, Chachi Bacala et Pete Rock. Ce dernier est notamment connu pour avoir produit l’emblématique « The World is Yours » de Nas, extrait de l’album culte « Illmatic » du prince de Queensbridge. Madlib, qui a collaboré avec Erykah Badu, Mac Miller, Kanye West et Kendrick Lamar, demeure aujourd’hui encore l’une des références incontournables du hip-hop américain. Par ailleurs, ce producteur prolifique continue de sortir de nombreux projets solos innovants, où sa patte artistique est immédiatement identifiable. Quant à J Dilla, originaire de Détroit, il a produit pour The Pharcyde, figure incontournable du rap underground, avant de connaître une ascension remarquable. Aujourd’hui, il inspire des artistes comme Joey Bada$$, autre talent majeur du rap new-yorkais. Ce dernier revisite notamment l’hymne du Wu-Tang « C.R.E.A.M » dans « Paper Trail », où il détourne la célèbre phrase en « CASH Ruined Everything Around Me », signe que le rap américain continue d’évoluer.
À l’écoute du projet récemment réédité par De La Soul en vinyle (avis aux amateurs), il est évident que l’album n’a pas pris une ride. Certains albums ou morceaux marquent une époque et témoignent du passage du temps. D’autres, au contraire, traversent les années sans perdre de leur pertinence. Parfois discrets, ils font pourtant partie intégrante de cette révolution culturelle qu’est le mouvement hip-hop, en marche depuis les années 80 et toujours en pleine évolution aujourd’hui.
