Le Morceau : Ce fut le premier extrait de l’album « Dyfrey », album à se procurer d’urgence pour ceux qui ne l’ont pas encore par ailleurs. C’est un morceau d’égotrip différent de ceux que l’on connait, Ol Kainry montre d’où il tire sa force, prend position sur le rap actuel, et se dévoile à travers ses forces et un peu ses faiblesses, loin de l’image du rappeur ganster hardcore, plus proche de l’humain Freddy avec ses côtés racailleux, ses côtés paternels… Le titre fait référence au concept présent dans Naruto selon lequel les membres du village de Konoha (appartenant au pays du Feu) où vit Naruto, sont liés par l’amour de leur communauté et la volonté de défendre le peuple du village.
Ici le Boug Dyfrey prend le parti de comparer cette volonté à celle dont il a besoin pour vivre et porter son passé sur ses épaules, pour affronter les épreuves du Futur. Bien sûr il tire lui aussi cette force de sa famille, sa fille notamment.
« Même si la vie m’a dosé, j’ai que l’permis et l’brevet / File-moi un mic que j’doggyne toutes les pâles copies de Rozay » Ol Kainry – La Volonté du Feu
Le sens : (« Rozay » = Rick Ross) Ouaip celle-là, elle pique ! Alors, dans l’ordre, on va voir pourquoi ça fait mal. D’abord Ol’ Kainry revient sur son parcours, il reconnait avoir eu une vie compliquée et affirme n’avoir « que le permis et le brevet ». En disant cela, tout d’abord il n’induit qu’il n’a pas le Bac, ce qui témoigne peut être d’une déscolarisation prématurée synonyme d’une entrée précoce dans les réalités de la vie d’adulte et des besoins concrets. Et ensuite, il élève le permis au rang de diplôme, ce qui appuie l’aspect immédiat de ses besoins, pouvoir conduire c’est concret, ça ouvre directement des portes, avoir la bac, c’est autre chose… En Bref, on a ici une façon très fine d’introduire l’idée de précarité via le parcours de l’auteur, une finesse rare au bout d’une plume.
Et après, tandis que nous sommes encore sous le charme de la tournure précédente, un peu fascinés par l’artiste, il en profite pour nous asséner une punchline monstre ! En effet, il arrive à marier égotrip et engagement. A la fois il affirme qu’en prenant le micro il peut violer des MC’s, en tout cas les doggyner (Doggy-Style ? Demande à ta maman… Où à Snoopy, tu sais, le rappeur qui tourne des films… Ah non, pas le dessin animé…), belle métaphore. Et à la fois il critique la manière qu’ont certains français de non pas s’inspirer des américains, mais carrément de les pomper, traduisant au mot près leur lyrics et utilisant leurs flows. Dyfrey compte bien fonder son Game à lui, avec ses codes, et n’avoir d’Américain que l’art et le talent ! Quel panache, quelle force, quel talent.
Technique : Au début de la première phase on a une alternance de sons voyelles entre « i » et « a » : « si la vie m’a ». Ensuite entre la première partie (avant la virgule) et la seconde partie de cette phase (qui riment entre elles d’ailleurs : doser/brevet), on observe une figure étrange mais très subtile. Dans la première partie, consonnes « douces » : « m », « s », « l », « v », « m », « s » ; tandis que dans la seconde s’introduisent des consonnes plus percutantes : « q », « p », « r », « b », « r ».
Et, magie, c’est pareil pour la deuxième phase avec une gradation dans la percussion des consonnes tout au long de la punchline, des plus douces aux plus percutantes pour finir par des consonnes « intermédiaires », à la fois douces et percutantes soit : « F », « l », « m » ; « q », « d », « g » « t » , « p », « c » ; « r », « z ».
De plus on a une structure de rimes très intéressante puisque la fin de la deuxième phase rime avec le début de la première (« dosé », « Rozay ») sans rime intermédiaire avec « Brevet ».
En gros, c’est du lourd !
Forme : + + + +
Fond : + + + +